dimanche 16 juin 2013

Erdogan: « les juifs sont responsables de la crise en Turquie ! »

Si quelqu’un souhaitait prouver que le gouvernement d’Erdogan est le pire que la Turquie ait connue depuis la fin du génocide arménien, voici un bon arguement supplémentaire.
Après deux semaines de manifestations, chaque côté des protagonistes commence à produire son propre récit, expliquer l’origine de la protestation et à planifier la prochaine étape.
TURKEY-MIDEAST-JEWS-CONFLICT-POLITICS
Du point de vue des manifestants, tout a commencé avec une lutte écologiste (imposée face aux diktats du gouvernement), pour devenir quelque chose de bien plus général.
L’objet de la colère des manifestants n’est plus Gezi Park, le parti au pouvoir ou même le gouvernement, mais un homme – le Premier ministre Recep Tayyip Erdogan.
Décrit comme un autocrate, des manifestants protestent contre ses tentatives d’islamisation de la société, contre son forcing à la création de « familles nombreuses », contre les codes de conduite devenus obligatoire (codes shariatiques).
Le comportement d’Erdogan envers les manifestants – son refus de rencontrer les dirigeants et les mesures sévères visant à réprimer les manifestations – est pour eux une preuve suffisante de leurs créances.
Les manifestants ont peu d’amour pour les médias turcs qui agissent comme des lapins intimidés, fournissent une faible couverture des manifestations et ont tendance à appuyer la position du gouvernement.
En revanche, au cours des derniers jours, et surtout depuis son retour d’une visite en Afrique du Nord, le Premier ministre turc a construit sa propre théorie des événements en cours. Au début, il avait une longue liste de supposés suspects derrière les protestations – partisans de l’opposition, des voyous, des gouvernements étrangers – mais récemment le récit du gouvernement prend une forme plus stable et ses accusations sont principalement destinées aux hommes d’affaires et investisseurs de grande envergure. Erdogan parle désormais des « lobbys ».
Selon lui, ceux-ci veulent entraver l’économie de la Turquie pour des profits à court terme. Bien que les partenaires coupables spécifiques n’ont pas été explicitement nommées, il semble qu’Erdogan face allusion à des investisseurs comme le magnat juif américain George Soros (d’extrême gauche) et d’autres hommes d’affaires juifs et occidentaux (de droite).
Ce qu’il ne dit pas, c’est pourquoi ces investisseurs devraient vouloir investir en Turquie, et de quelle manière ils influencent les manifestations…
Mais Erdogan n’est pas intéressé à répondre à ces questions. L’ennemi a été identifié, et la lutte est en marche.
En Israël et en Occident en général, l’histoire d’Erdogan sonne comme une théorie du complot loufoque, le genre de ce qui abonde dans le Moyen-Orient. Mais la version de Erdogan a été conçu avec soin.
Bien avant la présente protestation, une diminution significative de la croissance de l’économie turque a été marqué. Le fléau du pays est son énorme dette extérieure: la Turquie doit des dizaines de milliards de dollars aux débiteurs, en particulier à l’Europe et aux États-Unis, et l’intérêt qu’il doit payer est historique !
Les grands – certains diraient mégalomane – investissements dans des projets de l’Etat vident les caisses de l’Etat.
Erdogan et son équipe sont naturellement conscients des difficultés économiques imminentes, et par conséquent, le choix des spéculateurs financiers en tant que « mal suprême de la Turquie » n’est pas aléatoire.
Lorsque les informations désagréables sur la situation économique seront révélées l’année prochaine, avant les élections, le premier ministre pourrait se soustraire à sa responsabilité, après avoir averti au préalable que les investisseurs étrangers ont comploté pour faire chuter l’économie.
Le choix des investisseurs est également destiné à ternir le bord économique loin des protestations.

Par Le professeur Dror Zeevi. Il enseigne dans le département Middle East Studies à l’Université Ben Gourion, Beer-Sheva – Ynet – JSSNews

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